vendredi 3 septembre 2010

Samedi 21 Août 2010 !!!

Réveil en urgence... Bayram le propriétaire du verger où nous sommes installés à décider d'arroser !!! la Technique locale : on ouvre la vanne d'arrivée d'eau directement sur le canal de l'aqueduc, on laisse cela se déverser dans les fossés creuser pour l'irrigation - qanun en persan- et on laisse couler l'eau... on fend par endroit le bord du fossé pour laisser l'eau se déverser dans les champs... donc le principe général consiste à arroser par inondation. Une fois le sol gorgé d'eau, on arrête... sauf que, sauf que, dans le verger et les champs en question, il y a nos tentes... donc je me lève en sursaut, après avoir entendu un coup de pelle à 1m de mon oreille - il est 7h20 - je regarde par la porte... je suis inondé... donc décollage express... je fourre mon sleeping de toutes mes fringues et autres choses qui sont dans la tente... vire mon futon... enlève les sardines aux coins de la tente, et me promène à travers le verger pour trouver un endroit sec pour faire sécher le dessous la tente...qui se retrouve de fait sur le dos, le sol en l'air... pour quelques heures, une chance il fait beau et chaud :) Je finis pas me réinstaller sous les noisetiers et un figuier !

Dans l'entremise, François, notre collègue du CNRS à Jalès, se charge avec son culot de marseillais, de fermer la vanne d'eau... Bayram marmonne parce que son champ ne s'irrigue plus, mais on peut pas vivre sous les eaux... Une heure plus tard, Bayram revient, pas rancunier, avec quelques pommes et pêches qu’il vient offrir à François et nous en donne quelques unes en passant...

J'en profite ici pour revenir sur ces gens du pays de l'Arche dont je parlais plus haut... Naxçivan signifie "le pays des gens de l'Arche", on fait bien évidemment référence à l'Arche de Noé, qui a été sauvée des eaux du Déluge (+/- 2100 av. J.C.) sur le Mont Ararat... à 50 km l'ouest d'ici... les gens d'ici seraient donc les descendants de ce cher Noé ! :) et sans doute que ce mode d'irrigation est une vague réminiscence de leur survivance au Déluge - ah le pouvoir de la mémoire collective !!

La journée se passe comme elle doit se passer, je fais le tri et photographie tout le matériel du chantier 1 de 2009 - 300 photos à 14h ! je crois que je vais loader assez vite mon mac !!!- et l’après-midi je commence la macro de ce même chantier 1.

En fin de journée l'équipe "sel", qui travaille sur la mine de sel de Duz Dagi (“montagne de sel” en Azeri) vient nous rejoindre, deux d'entre eux repartent demain matin pour Lyon. Donc on se fait une soirée avec l'équipe au complet, nous sommes une douzaine à table ! Fatma notre cuisinière nous a fait une super bouffe de riz iranien au kushuzumu (“raisins à oiseaux”, tous petits raisins secs très doux) et une sorte de piperade locale, c'est super bon ! le tout arroser de bières turques et de Aragi (que je redécouvre !), on appelle ça aussi de l'Arak, en fait ça n'a rien à voir avec l'arak levantin, ou le Raki turque, il s'agit d'une vodka aromatisée. Eh oui jusqu'en 89, le Naxçivan était dans l'Union, donc l'héritage qui va avec est la production et surtout la grande consommation de vodka... Il en existe de toutes sortes : patate, seigle, blè, orge... Ce fameux Aragi finalement est parfumé avec ce qu'on appelle ici du Kekiç (kékitch), une sorte de marjolaine... c'est très parfumé au nez... en bouche ! c'est de la vodka, entre alcool à 70 et alcool à 90° ! Je l’ai essayé en cocktail avec du Sehbet de Griotte, mais c’est pas terrible, le sehbet (fruits aux sirop, d’où on tire le mot sorbet... Ça vient donc de Perse et du persan) est trop doux liquoreux et la vodka à la marjolaine... Bref... C’est bof... Mais je gâche pas :P !

À propos de sel, je m'interroge toujours sur mes fameuses poteries et sur leurs variations colorimétriques... à priori, selon les analyses que j'ai déjà fait, je n’ai pas de grosses variations dans la qualité des terres, sauf que ! les pots en tant que tels ont des teintes variant du beige au rose... et Miné, notre restauratrice s'interroge sur la qualité des pièces qu'elle restaure... tout est friable, elle doit tout consolider au paraloïd pour que les recollages tiennent... elle me dit que les tessons sont pleins de sels et que c'est pour ça que les tessons sont en si mauvaise qualité... dans la discussion, elle me demande si mes poteries ont un taux important de sodium... chose que je vérifie et compare immédiatement avec le matériel de Tell Afis, déjà analysé. Et... les céramiques d'Oçular contiennent entre 1 et 3,5 % de Sodium alors que celles de tell Afis ont moins de 0,17% de sodium, voire un taux indéterminable à l’ICP... donc aurait-on trouvé un marqueur géochimique pour caractériser les argiles locales ??? Yves t'en penses quoi ? Commentaires please !!!

Autres anecdotes de ce samedi après-midi... en m'installant dans le laboratoire, je bouscule deux trois choses sur la table qui va devenir mon espace de travail... et tranquillement, mais assez effrayé finalement, sort de dessous une pile de livre, un jeune scorpion jaune de 2cm environ... je le taquine avec la mine d'un crayon pour essayer de l'attraper et de le tuer... manque de bol, il va se planquer dans le mur en briques crues... il restera sauf et va rejoindre ses petits amis, qui grouillent la nuit sur le perron de la maison de fouille... C'est Halil, notre dessinateur syrien, qui faisant le ramadan et vivant de nuit, les voit en faisant ses dessins nocturnes...

Dernière anecdote de la journée, Veli Baxshaliyev, notre hôte et académicien de Naxçivan, veut savoir quels sont mes résultats... je sors donc la conf que j'ai donné pour l'AEPOA au printemps... et lui traduit mon speech en turc... c'est tuff... je n'ai pas tout le vocabulaire... mais ce qui me sauve c'est que j'ai épluché la carte géologique du coin, en turc-azeri et le vocabulaire scientifique est quasi le même que le nôtre, alors je me débrouille pas si mal.... pendant mon speech je me rends compte que Miné est sur mon épaule en train d'écouter, on fait le speech sous la pergola dans le verger... ouf... elle va pouvoir me filer un coup de main entre anglais et turc... ben non, elle trouve que je me débrouille bien... bon finalement, on termine la discussion à trois dans les deux langues... anglais et turc... et finalement grâce à ce speech et comme je suis le seul céramo-archéomètre dans le pays, je me dégote la permission du grand chef d'échantillonner sur les autres sites du Naxçivan, contemporains du nôtre ! Reste à savoir quand il sera possible d'avoir accès au matériel et ça, c'est une autre histoire...

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